La baie des anges, fiche pédagogique La baie des anges fiche pédagogique

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Présentation

Cette œuvre est emblématique du cinéma de Jacques Demy. L’étude ci-après s’adresse aux professeurs et aux élèves. Elle constitue un parcours de formation, reposant sur quatre critères : formes, techniques, significations et usages. Elle propose différentes approches disciplinaires et transversales.

Séquence issue du film : La Baie des Anges, Jacques Demy, 1962. Consultable ICI :
Séquence du film : Time code 21’10 à 24’20

Quoi ? Comment ?

Une séquence du film d’une durée de 3 minutes environ, située à 21’30 du début.

La séquence concerne la rencontre entre Claude Mann et Jeanne Moreau dans un casino. Première apparition de Jeanne Moreau dans le film.

Pour basculer du réel au conte, le cinéaste joue d’emblée sur les contrastes et le noir et blanc, le rythme, la lenteur, les bruits, les silences et la musique. Pour Jaques Demy, le cinéma est l’art de rendre la réalité merveilleuse. Au cours de la séquence, le réel devient de plus en plus poétique. Puis le mythe s’installe en direct sous les yeux du spectateur qui quitte le monde pour pénétrer dans un conte.

Que voyez-vous ?

La scène commence en plan large. Claude Mann déambule dans le casino. Les sons, l’ambiance, la lenteur du plan, renforcent le côté documentaire. Puis Claude s’approche d’une table de jeu et la caméra le resserre en plan américain. Il est de dos. De l’autre côté de la table, Jeanne Moreau, les cheveux blonds platine et vêtu de blanc, constate avec les hommes en costumes sombre et Claude en premier plan. Elle semble apparaître dans une auréole lumineuse, telle Marie. Métaphore de la fée et de l’apparition de l’Amour sur terre, sa seule présence transforme la réalité en quelque chose de magique. Après un premier sourire de Jeanne Moreau à Claude Mann, qui lie désormais le destin des deux personnages, la caméra se rapproche de son visage. Elle a une beauté vénéneuse. D’ailleurs son charme fonctionne puisque la caméra la quitte pour suivre Claude qui va la rejoindre. Les deux personnages, réunis dans un même cadre forment un couple que les inserts de la roulette viennent souder.  La musique démarre. Le conte de fée peut commencer.

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Qui, quoi, quand ?

Jacques Demy est né à Pontchâteau en 1931 et fit des études aux Beaux Arts de Nantes.

© droits réservés

La Baie des Anges, Raoul Dufy, 1927

Il est le cinéaste le plus « provincial » de la Nouvelle Vague puisque tous ses films se déroulent en province (Nantes, Cherbourg, Rochefort...) C’est son goût pour la lumière, la peinture et son admiration pour les aquarelles de Raoul Dufy (notamment son tableau La Baie des Anges) qui le pousse à tourner son deuxième long métrage sur la Côte d’Azur. C’est à Juan les Pins, Cannes, Nice et Monte-Carlo que le cinéaste retrouve l’ambiance solaire, lumineuse et colorée qu’il avait admirée, plus jeune, chez des peintres comme l’anglais David Hockney ou Edward Hopper. 

Le savez-vous ?
Le film La Baie des Anges est né d’une blague que la productrice de Jacques Demy lui a faite, un soir au Festival de Cannes. Personne ne voulant investir dans le futur projet des Parapluies de Cherbourg, Mag Bodard lance au cinéaste pour plaisanter : « allons au casino ! Nous gagnerons de l’argent pour faire le film ! » C’est en pénétrant pour la première fois dans un casino que Jacques Demy, fasciné par l’addiction de tous ces joueurs, eut l’idée du film. Il mit quinze jours pour en écrire le scénario et tourna ce film à petit budget dans la foulée.    
Énigme
Comment représenter mythes et contes au travers d’une œuvre cinématographique ?

Œuvres en lien

© ciné tamaris, droits réservés

Affiche du film La Baie des Anges, Jacques Demy, 1962

© droits réservés

La Baie des Anges, Raoul Dufy, 1927

Eurydice-p

Orphée ramenant Eurydice des enfers, Camille Corot, 1861

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Affiche du film Peau d’âne Jacques Demy 1970

Parcours culturel

Parcours HDA :D’autres œuvres de Jacques Demy: Les Parapluies de Cherbourg (1964), Les Demoiselles de Rochefort (1967), Peau d’Ane (1970), 

Parcours géographique : correspondances culturelles locales, sur les traces des films de Jacques Demy, lieux de tournage : La Baie des Anges (Région de Nice), Lola (Nantes), Les demoiselles de Rochefort (Rochefort), Les Parapluies de Cherbourg (Cherbourg)

http://www.archives.nantes.fr/PAGES/EDUCATIF_NEW2/dossierspeda_pdf/visites_DPARC/jacques_demy_livretenseignantprimaire.pdf

Parcours intellectuel et sensible : relations thématiques, problématiques, artistiques … Le mythe d’Orphée, l’art des costumes au cinéma, les comédies musicales.

Disciplines

Niveau Axes des programmes Contribution à l’HDA Œuvres/documents  en écho Transversalité

3ème

Seconde

première

Terminale

Français

Narration

- Etude du Mythe d’Orphée à partir du film La Baie des Anges

- L’adaptation des mythes au cinéma

- Etude des contes (mécanique narrative, personnages, thèmes…)

Psychanalyse des contes de fée, Bruno Bettelheim

 

La place du jeu dans la société

Jeu et addiction

La passion amoureuse

Philosophie

- Hasard et nécessité

- La Passion

 

Sciences physiques

Mathématiques

 

- La lumière (physique, optique…) et la couleur (prisme, ondes…)

- Le hasard (probabilité, statistique…)

 

 

Questionnement

PICTURAL HISTORIQUE NARRATIF

La représentation de la passion amoureuse dans la photo « noir et blanc »

Les représentations du « jeu » dans la peinture

Histoire des jeux de hasard

Représentation de la femme dans le cinéma des années 50

Étude de la métaphore du conte de fée à travers la structure dramatique du film

Analyse de l’espace filmique (intérieurs, extérieurs)

Bibliographie / Sitographie générales

Le cinéma enchanté de Jacques Demy, Camille Taboulay, éditions Cahiers du cinéma

Jacques Demy et les racines du rêve de Jean-Pierre Berthomé, éditions l’Atalante

Activité pédagogique accompagnant  l’œuvre

Un travail pédagogique sur un aspect de l’œuvre de Jacques Demy :

1. Conte de fée et cinéma

  • L’art de la métaphore
  • Personnages

2. Projection de la séquence du film correspondant au time-code :

Questions-réponses

  • sur le film lui-même (le choix des cadrages, de la lumière, du jeu des contrastes, du jeu des acteurs)
  • sur les questions qui se posent en ce qui concerne représentation d’un mythe dans une œuvre artistique
  • sur l’influence de la peinture de Lonor Fini, Hopper, Hockney et Dufy sur l’œuvre de Demy

Activité pédagogique sur l’étude de l’affiche du film

Analyse de l'affiche
© ciné tamaris, droits réservés

Affiche du film La Baie des Anges, Jacques Demy, 1962

L’affiche renvoie à la passion de Jacques Demy pour la peinture.

Élève des Beaux Arts de Nantes, le cinéaste fut très marqué par des peintres comme Leonor Fini qui faillit d’ailleurs dessiner les costumes de son film Peau d’âne, ou de David Hockney pour ses lumières de la côte californienne.

Mais celui qui eut le plus d’influence sur Demy est certainement Raoul Dufy.
Le bleu marin de son aquarelle La Baie des Anges n’est pas sans rappeler celui de l’affiche du film.
Sur ce bleu à la fois bleu «mer » et bleu « nocturne », Jeanne Moreau, avec sa blancheur presque diaphane et son porte cigarette, représente à la fois l’image d’une fée de la nuit et d’une « Cruella » irrésistible, d’une sirène maléfique dont le « chant » fera dévier le destin du jeune homme.

En bas de l’affiche, comme écrasé par la « démonique » femme fatale, le couple, à la fois fasciné et effrayé par la roulette, est cerné entre l’amour et le jeu.
Prisonnier d’un même destin, l’homme en noir (il est l’ombre) et la femme en blanc (elle est la lumière) sont serrés l’un contre l’autre, unissant ainsi leur passion

À partir des éléments présentés dans ce document et du lexique, répondre en quelques lignes à la question suivante : En quoi le film incarne-t-il un conte moderne ?

Lexique

Cadrage, cadre : Organisation d'une image délimitée par les quatre bords de la fenêtre de prise de vues. Par extension, composition visuelle résultant de cette opération qui met en cause à la fois la focale de l'objectif utilisé, la profondeur de champ, l'angle de prise de vues, la distance de l'appareil à l'action, la composition de l'action elle-même et les mouvements de l'appareil relativement à ceux de l'action.

Champ : Portion d'espace comprise à l'intérieur des limites du cadre et donc visible à l'écran. L'espace cadré du cinéma est toujours infirme d'une dimension: celle du sixième mur virtuel à partir duquel on filme les cinq autres. Le retournement à 180° du cadre, qui révèle le point de vue complémentaire du champ, en propose le contrechamp.

Champ-contrechamp : Figure de montage qui fait se succéder de façon systématique le champ et son contrechamp. On l'emploie particulièrement pour alterner les plans sur deux personnages lorsque ceux-ci se font face.

Séquence : désigne un ensemble de plans se déroulant dans un même lieu et dans un même temps.

Time code : information temporelle concernant chaque image enregistrée sur la bande vidéo selon un format heure : minutes : secondes : image. Cette information permet de repérer facilement durant le montage une image ou un ensemble d’images (plan) enregistrés. Exemple : 01:15:12:24 signifie la 24ème image (soit la dernière) de la douzième seconde de la soixante quinzième minute enregistrée.

Plan : Suite continue d'images résultant d'une prise de vues ininterrompue. C'est l'unité de base du montage, longue d'au moins une image, seulement limitée
 par la longueur d'un chargeur de pellicule ou d’une cassette de bande vidéo. On notera que ce qui peut apparaître comme un seul plan à la projection résulte
 parfois de l'assemblage de plusieurs plans reliés entre eux par des raccords invisibles ou des trucages.

Plans (échelle des) : Le désir de classification amène à proposer un système de désignation des cadrages qui se fonde le plus souvent sur le type d'inscription
 du corps humain dans le cadre, système assez proche de celui qui désigne traditionnellement le rapport du cadre au sujet en peinture.
 Du cadrage le plus serré jusqu'au plus large, on distinguera ainsi :

 - le très gros plan, qui isole un détail comme un œil, une bouche ;

 - le gros plan, qui isole une partie du corps comme la tête ou les mains ;

 - le plan rapproché, qui cadre le buste aux épaules ou à la poitrine ;

 - le plan américain, qui coupe le corps à mi-cuisse ;

 - le plan moyen, qui cadre le corps en pied ;

 - le plan de demi-ensemble, qui inscrit le corps en position privilégiée dans le décor qui l'environne ;

 - le plan général ou d'ensemble, qui privilégie l'ensemble du décor.