L'oeuvre de Jean-Marie Gustave
Le Clézio
Jean-Marie Gustave Le Clézio, écrivain français d’envergure internationale, Prix Nobel de Littérature en 2008, est né à Nice le 13 avril 1940 d’un père mauricien d’origine bretonne et d’une mère française. Voyageur dans l’âme, il partage aujourd’hui sa vie entre la France, le Mexique, le Maroc…
Jean-Marie Gustave Le Clézio
Présentation de l’écrivain |
De quoi avez-vous besoin pour vivre ? A cette question posée par un journaliste en 1969, JMG Le Clezio répondait : - « Il doit y avoir beaucoup de soleil pour moi, c’est une chose indispensable… Et des paysages assez beaux pour que l’on puisse garder confiance en la vie ». Impossible alors de ne pas penser à Nice, à la mer, au soleil, ville ou naît l’écrivain le 13 avril 1940 dans une famille d’origine bretonne, émigrée à l’île Maurice depuis la fin du XVIII e siècle. L’enfant expérimente la deuxième guerre mondiale qu’il passe avec sa mère et sa grand-mère dans deux chambres mansardées, au sixième étage d'un immeuble niçois « Pourquoi écrit-on?…. Si j'examine les circonstances qui m'ont amené à écrire -je ne le fais pas par complaisance, mais par souci d'exactitude- je vois bien qu'au point de départ de tout cela, pour moi, il y a la guerre. … La guerre, non pas comme un grand moment bouleversant où l'on vit des heures historiques… Non, la guerre pour moi, c'est celle que vivaient les civils, et surtout les enfants très jeunes. Pas un instant elle ne m'a paru un moment historique. Nous avions faim, nous avions peur, nous avions froid, c'est tout. » (Discours de réception à Stockholm, décembre 2008) Son père, d’origine britannique, est médecin de brousse en Afrique. Sa vie par la suite s’écrira et se posera au gré des voyages et des continents : « Je suis toujours en fuite ou en poursuite. Je ne flâne jamais. Je ne vis que d’émotions. » Emotions travaillées, mûries, qui passent par l’intérieur et qui ressortent sous la forme d’une écriture fluide, libre, inspirée. Des phrases courtes, nourries d’adjectifs, qui vont à l’essentiel de l’être, de la vie, pleines de sensualité. Une plume limpide et sublimée, ronde comme un galet poli par les vagues de la Méditerranée. « Ce pain trop blanc, trop doux, qui sent trop bon, cette huile de poisson qui coule dans ma gorge, ces cristaux de gros sel, ces cuillerées de lait en poudre qui forment une pâte au fond de ma bouche, contre ma langue, c’est quand je commence à vivre. Je sors des années grises, j’entre dans la lumière. Je suis libre. J’existe. » Ritournelle de la faim p.13, Gallimard, 2008. |
Son séjour en Afrique |
Tout commence lorsqu'il embarque à 7 ans en compagnie de sa mère et de son frère sur le «Nigerstrom», un cargo qui relie l'Europe à l'Ouest africain, pour retrouver son père qu’il ne connaît pas. Curieusement, l’enfant préfère rester enfermé dans la cabine que s’installer sur le pont. Dans la torpeur d’un voyage qui n’en finit pas il écrit son premier roman «Quand donc partez-vous, monsieur Awlb?». L’enfant qui ne connaît que la ville découvre la liberté, la vie dans la nature, comment marcher pieds nus tout en se protégeant de la morsure des fourmis rouges. Le récit de cette enfance africaine donnera Onitsha (1991) puis l’Africain (2004). |
Retour à Nice et début de la notoriété |
De retour à Nice, JMG Le Clezio est admis à 17 ans en Lettres Supérieures. Il s’intéresse au dessin, à la peinture. Fréquente assidûment les salles de cinéma et en particulier le ciné-club Jean Vigo, sur les hauteurs de Nice. L’émotion esthétique ressentie alors sera transcrite dans son récit Ballaciner (Editions, Gallimard 2007) : « Au moment d'en parler, il me semble éprouver encore l'espèce d'impatience qui s'emparait de nous, avant la projection, tandis que le présentateur, fiches en main, faisait l'historique de ce qui avait inspiré, porté et mis au monde le film que nous allions découvrir. La séance terminée, nous étions lâchés dans la nuit, au sommet d'une colline. Il n'y avait plus de bus, et peu d'entre nous disposaient d'un moyen de locomotion. Commençait alors la longue descente vers la ville, durant laquelle nous parlions avec emportement, parfois avec justesse, de ce que nous avions vu, de ce que nous avions vécu. Des flirts parfois s'engageaient entre garçons et filles, des amitiés se resserraient. Dans les rues désertes, les discussions se prolongeaient, au pied d'un immeuble, sur une place. Il y avait des contrôles de police (c'était l'époque troublée de la guerre d'Algérie, des sociétés secrètes marxistes). Je me souviens d'incidents étranges, de rencontres imprévues. D'une certaine façon, le cinéma était entré dans nos vies, nous avait transformés. » JMG Le Clezio explore tour à tour plusieurs genres littéraires : poésie, roman, essai philosophique, essai historique. La notoriété le touche très jeune. A l’âge de 23 ans, il obtient le prix Renaudot pour Le Procès-verbal. Un roman écrit en quatre mois au sous-sol du Café de l'Univers, à Nice. Un choc dans le milieu littéraire, on parle de «lyrisme attentatoire». |
L’expérience amérindienne |
Grâce au prix Renaudot, JMG Le Clezio ne fait plus qu’une chose écrire… et voyager. En particulier au Mexique où il vit de 1970-1974 avec les Indiens Emberas et Wounaans. Cette expérience amérindienne, qui se prolonge dans d'autres lieux, comme le Michoacán et le Nouveau Mexique, lui inspire La Guerre, Haï et Les Géants. Il vit à Jacona, au pied du volcan Paricutín pendant une dizaine d'années, qui lui permettent de faire la connaissance des mythes anciens, de l'histoire et de la tradition des Amérindiens. La traduction des textes comme La relation du Michoacán et Les Prophéties du Chilam Balam, et l'écriture des textes narratifs comme Le Rêve mexicain, La Fête chantée, Angoli Mala et Ourania et le texte de nature descriptive Diego et Frida attestent d'une réelle emprise de Le Clézio par l'imaginaire amérindien. Il soutient une thèse sur le thème « La relation de Michoacán » à l'Université de Perpignan. Il enseigne à l'Université du Nouveau Mexique à partir de 1977. |
Voyages |
Le Sahara occidental, dont Jémia, sa seconde femme depuis 1975, est originaire, lui inspire Désert, roman qui reçoit le prix Paul Morand de l'Académie française en 1980, et la publication d'un journal de voyage, Gens des nuages qui relate les étapes de ce périple à la rencontre des personnages légendaires, ancêtres de sa femme. Le Clézio se rapproche de l'Île Maurice à la recherche de ses ancêtres, les Le Clezio partis de Bretagne et installés sur l’île depuis 1793. Cela donnera : Le Chercheur d'or, Voyage à Rodrigues, La Quarantaine, Sirandanes. JMG Le Clezio a enseigné à l’université bouddhiste en Thailande en 1966-67, à l’université de Mexico, de Boston, du Texas, Austin, et à l’université du Nouveau Mexique, Albuquerque. Ensuite à partir de 1973 il partage son temps entre la France, les Etats-Unis et l’île Maurice. L’écrivain voyage au Nigeria et au Japon et publie des traductions des textes sacrés Mayan. Ces dernières années il vit principalement au Nouveau Mexique. En 2007-2008 il travaille comme enseignant en Corée du sud. |
Le Prix Nobel de Littérature |
JMG Le Clézio reçoit le Prix Nobel de Littérature en 2008. Dans son communiqué de presse du 9 octobre 2008, l'Académie suédoise salue « l'écrivain de la rupture, de l'aventure poétique et de l'extase sensuelle, l'explorateur d'une humanité au-delà et en-dessous de la civilisation régnante. » Lire JMG Le Clézio, c’est accepter de plonger corps et âme dans un univers transcendant et sensuel, c’est prendre le temps de regarder un enfant jouer au bord de la mer, lever les yeux vers les étoiles la nuit, écouter le silence, marcher dans le désert. C’est accepter que le langage devienne musique. Lire GMG Le Clezio c’est réapprendre à respirer, c’est comprendre que la beauté est partout, c’est se mettre en vibration avec le chant du monde. « Quand ils ont terminé tout cela, cette terre est à eux. Non comme s’ils la possédaient pour l’éternité, mais pour qu’ils en vivent et en jouissent. Cette terre leur a été donnée par les esprits des morts pour qu’ils continuent leur historie. Elle est un être vivant qui bouge et s’étend avec eux, leur peau sur laquelle passent les frissons et les désirs. » Raga : approche du continent invisible, Edition Seuil.C’est aussi aujourd’hui plus que jamais découvrir, lire, relire, l’œuvre d’un homme fidèle aux utopies et aux indignations qui humblement, loin du monde bruyant, place la littérature à hauteur d'homme. |
Bibliographie et sources |
RomansLe Procès-verbal. Paris: Gallimard, 1963. Le Déluge. Paris: Gallimard, 1966. L'Extase matérielle. Paris: Gallimard, 1967. Terra amata. Paris: Gallimard, 1967. Le Livre des fuites. Paris: Gallimard, 1969. La Guerre. Paris: Gallimard, 1970. Haï. Genève: Albert Skira, 1970. Les Géants. Paris: Gallimard, 1973. Voyage de l'autre côté. Paris: Gallimard, 1975. L'Inconnu sur la terre. Paris: Gallimard, 1978. Désert. Paris: Gallimard, 1980. Le Chercheur d'or. Paris: Gallimard, 1985. Onitsha. Paris: Gallimard, 1991. Étoile errante. Paris: Gallimard, 1992. Pawana. Paris: Gallimard, 1992. La Quarantaine. Paris: Gallimard, 1995. Poisson d'or. Paris: Gallimard, 1997. La Fête chantée. Paris: Le Promeneur, 1997. Hasard suivi de Angoli Mala. Paris: Gallimard, 1999. Révolutions. Paris: Gallimard, 2003. Ourania. Paris: Gallimard, 2006. Ritournelle de la faim. Paris: Gallimard, 2008. Nouvelles, contes, romancesLa Fièvre. Paris: Gallimard, 1965. Mondo et autres histoires. Paris: Gallimard, 1978. La Ronde et autres faits divers. Paris: Gallimard, 1982. Villa aurore suivi de Orlamonde. Paris: Gallimard, 1983. Printemps et autres saisons. Paris: Gallimard, 1989. Cœur brûle et autres romances. Paris: Gallimard, 2000. PortraitsDiego et Frida. Paris: Stock, 1994. L'Africain. Paris: Mercure de France, 2004. Journaux de voyageVoyage à Rodrigues. Paris: Gallimard, 1986. Gens des nuages (avec Jémia). Paris: Gallimard, 1997. EssaisMydriase. Montpellier: Fata Morgana, 1975. Vers les icebergs. Montpellier: Fata Morgana, 1978. Trois villes saintes. Paris: Gallimard, 1980. Le Rêve mexicain. Paris: Gallimard, 1988. Raga. Approche du continent invisible. Paris: Seuil, 2006. Ballaciné. Paris : Gallimad, 2008 Traductions par J.-M. G. Le ClézioLes Prophéties de Chilam Balam (adaptation de l'anglais et de l'espagnol). Paris: Gallimard, 1976. La Relation du Michoacan (traduction de l'espagnol). Paris: Gallimard, 1984. Sirandanes, suivies d'un Petit lexique de la langue créole et des oiseaux (choisies et présentées par J.-M. G. et Jémia Le Clézio). Paris: Seghers, 1988. MémoireLa Solitude dans l'œuvre d'Henri Michaux. Mémoire de Diplôme d'Études Supérieures, Faculté des Lettres d'Aix-en-Provence, 1964. Prix et distinctions littéraires1963 Prix Théophraste Renaudot, pour Le Procès-verbal. 1980 Prix Paul Morand, pour Désert. 1994 Prix du plus grand écrivain francophone du magazine Lire. 1997 Prix Puterbaugh, pour l'ensemble de son œuvre. 1997 Prix de la Principauté de Monaco, pour La Fête chantée. 2008 Prix Nobel de Littérature, pour l'ensemble de son œuvre. |
Autres sources |
Autres sourcesSur l'auteur:http://calounet.pagesperso-orange.fr/presentation_auteurs/leclezio_presentation.htm DVD
J.M.G. Le Clezio Entre les mondes /François Caillat. 2008, 52 mn. My Factory Production. |