L’œuvre de Bernar Venet

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Depuis les années 80, Bernar Venet se consacre à ses Lignes indéterminées, Combinaisons aléatoires et autres Accidents. Des sculptures gigantesques en acier Corten de formes géométriques (arcs, angles, lignes brisées…) ayant chacune leur propre identité mathématique. Il est aujourd’hui un artiste de renommée mondiale et a crée une fondation au Muy dans sa villa du Var. 

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Présentation 
C’est en 1961, à l’âge de 20 ans, que Bernar Venet fait son entrée fracassante dans le monde de l’Art. Avec Performances dans les ordures, l’artiste se roule dans les ordures de la caserne de Tarascon, là où il fait son service militaire, et devient ainsi l’un des principaux fondateurs de l’art conceptuel. Suivent ensuite ses « goudrons sur toiles », ses monumentaux tas de charbons déversés sur d’immenses surfaces vides qui feront sa notoriété. Mais son goût pour les sciences le tourne vers un art plus « mathématique ».
Première Période : Performances et Tas de charbon

Bernar Venet est né en 1941 à Château-Arnoux-Saint-Auban dans les Alpes-de-Haute-Provence. Destiné à l’usine comme toute sa famille, Bernar Venet doit son salut au peintre Pierre-Auguste Renoir. C’est en apercevant une reproduction d’un tableau de Renoir dans la vitrine d’un marchand de matériels de peinture que Venet a une révélation. Il prend conscience qu’être artiste est un vrai métier et non un simple passe-temps. Il voit là l’occasion d’échapper à sa condition d’ouvrier et se jure de devenir un grand artiste. A 11 ans, il expose ses premiers tableaux dans son village, se présente rapidement au concours d’entrée des Arts déco de Nice mais échoue. Contraint de trouver du travail, il devient assistant décorateur à l’Opéra de Nice jusqu’en 1960, tout en suivant des cours de dessin et de peinture à la villa Thiole. En 1959, il fait la rencontre de Ben (Benjamin Vautier), l’un des fondateurs du futur groupe Fluxus. Venet ne partage pas vraiment son goût pour le dadaïsme mais sa théorie selon laquelle « l’artiste doit s’approprier le monde et l’œuvre d’art doit être un choc », le séduit. Venet fréquente assidument une boutique que Ben a achetée et transformée en un lieu d’exposition et de rencontres, véritable vivier de futurs grands artistes : César, Arman, Martial Raysse, Yves Klein… On y parle déjà de Nouveau Réalisme et de Pop Art. Lors de ces rencontres, Venet écoute, apprend, retient, absorbe. L’idée que « tout est art » et que « tout est possible en art », Venet s’en souviendra. Surtout lorsque Ben débutera sa série des « Tas », entassant ça et là des déchets qu’il signe comme une toile de maître.  

C’est en 1961, à l’âge de 20 ans, alors qu’il fait son service militaire à Tarascon, que Bernar Venet a l’idée de sa première œuvre artistique : il se roule dans les ordures de la caserne et signe son « geste conceptuel » d’un Bernar Venet sans « d » en hommage au plasticien niçois Arman. Fier d’avoir un grand artiste dans ses murs, la caserne lui réserve un grenier dont il fait son atelier. « Un jour, je me promenais et je vois une paroi verticale avec une coulée de goudron dessus. Ça a été très important pour moi. Cette matière m’intéressait autant que la gravité qui lui avait donné une forme ». Venet se lance alors dans des « goudrons sur toiles », unichromes et monochromes. Le goudron remplace la peinture noire. Et pour lui, cette œuvre a déjà un sens : « le noir c’est le rejet de la communication facile ». L’artiste exprime ainsi sa révolte contre la notion de style imposée dans les années 50. Il veut faire voler ce diktat en éclats en explorant différents domaines : films, photos, poèmes, peinture au goudron, musique (« avec un magnétophone sur une brouette qui enregistrait le bruit de la brouette »)… Mais c’est avec la sculpture que Venet atteint son paroxysme. C’est lors de son retour d’Algérie en 1963 qu’il tombe dans la rue sur un tas de graviers mélangé à du bitume et qu’il a l’illumination. Ce qu’il faisait jusque là sur des tableaux, il veut désormais le faire en volume. Mais le magma bitumeux est tellement lourd et difficile à travailler que Bernar Venet décide de le remplacer par du charbon. C’est dans son atelier situé dans le vieux Nice au 18, rue Pairolière que naît, en 1963, sa première œuvre en 3D : Tas de charbon, 10 m3 d’anthracite déposés à même le sol. Venet frappe fort. En avance sur son temps, il devient du jour au lendemain le précurseur de l’antiforme et du conceptualisme, mouvement qui débutera 6 ans plus tard, en 1969, lors de l’exposition Conception au musée d’art moderne de Leverkusen en Allemagne.

Bernar Venet se fait une place parmi les grands noms du Nouveau Réalisme et expose plusieurs années de suite au Salon Comparaisons du Musée d’Art Moderne de Paris.

Période new yorkaise

Même si en France, Venet commence à se faire un nom dans le cercle encore très fermé de l’Art moderne, ses œuvres ne lui permettent pas encore de vivre décemment. L’artiste est dans le besoin, Arman l’aide. Il lui offre une de ses œuvres et sous-entend qu’il peut la revendre afin de se payer un voyage pour New York. Voyant là une chance inespérée de mettre un pied dans la Mecque de l’Art Moderne, Venet se ne fait pas prier et débarque aux USA en avril 1966 sans quasiment un sous en poche. Arman l’héberge quelques temps dans son atelier. Venet y rencontre et y côtoie tous les plus grands artistes du moment. Il se fait vite remarquer par ses concepts originaux et totalement novateurs. C’est vers le langage mathématique et les sciences pures qu’il oriente cette fois ses recherches – pour lui, une source d’inspiration illimitée. Il transforme les équations mathématiques les plus complexes en œuvres graphiques sur toiles, telles Représentation graphique de la fonction y=-x^2/4 (1966), Vecteurs Égaux – Vecteurs Opposés (1966), Graph Theory (1969), An Algebric Structur for Graphes (1969). Ces œuvres « monosémiques » n’accordent aucune interpénétration. Une seule lecture en est possible. Venet explique : L’introduction de la non-figuration dans l’histoire de l’art a été une étape capitale. Certainement la plus radicale pour ce qui concerne les arts plastiques. Enfin l’œuvre d’art n’était plus subordonnée à la nature et, grâce à cette sorte d’émancipation, elle imposait son autonomie. Ce problème lié à l’identité de l’œuvre d’art m’a toujours intéressé et trouve déjà ses racines dans mes peintures Goudron ainsi que dans le Tas de charbon - et ce, dès 1963. Chaque fois, il s’agissait d’un matériau présenté dans sa spécificité, dépourvu d’artifices et de connotations multiples.
L’introduction du domaine mathématique dans mon travail tente de pousser à l’extrême ce problème de l’identité de l’œuvre d’art en introduisant des signes univoques, en suggérant la
« monosémie » comme hypothèse de travail. Toute mon activité durant ma période dite
« conceptuelle » s’est employée à cette tâche [1].

En 1967, Bernar Venet rencontre d’imminents scientifiques du département de physique nucléaire de l’Université de Columbia afin de procéder à des enregistrements de conférences qu’il expose ensuite. Ce qui fera dire à Marcel Duchamp : « Venet, vous vendez du vent ! » et d’ajouter : « La vente de vent est l’évent de Venet » [2]. En effet, Bernar Venet est de toutes les expositions et il vend bien. Il est un artiste à succès sur lequel il faut désormais compter. Les musées du monde entier commencent à s’arracher ses œuvres, notamment le prestigieux Museum of Modern Art de New York. « L’usage des mathématiques, telles que je les pratique, a pour but d’introduire une autre réalité. Il s’agit d’un langage qui a ses particularités formelles, sa propre organisation, ses règles esthétiques. Ce qui m’intéresse ici, c’est la richesse d’une proposition libérée des contraintes stylistiques d’un art qui se reconnaîtrait dans les grands mouvements de l’histoire du XXème siècle »[3].

Mais en 1971, après une rétrospective de son œuvre lors de l’exposition collective Conceptual Art and Conceptual Aspects au New York Cultural Center, Bernar Venet décide, à la manière d’un Duchamp, d’arrêter brusquement sa carrière. A 30 ans, le déjà très célèbre artiste pense avoir tout dit, tout exprimé, être arrivé au bout de son art.

[1] Entretien avec Philippe Piguet - 2012[2] Entretien avec Harry Bellet, Le Monde 11 janvier 2011[3] Entretien avec Philippe Piguet

Retour en France : Arcs et Angles

Bernar Venet revient en France et s’installe à Paris avec sa femme. Pendant six ans, il cesse toute activité plastique et se consacre uniquement à l’écriture et à l’enseignement. Lui, le fils d’ouvrier, qui n’a jamais été à l’école, donne des cours sur l’Art et la théorie de l’Art un peu partout en Europe : Sorbonne, Italie, Pologne, Belgique, Angleterre... Il rattrape le temps perdu et se cultive, lisant tout ce qui lui tombe sous la main : philosophie, sciences, sémiologie… Il apprend ainsi à appréhender un peu mieux son propre travail et à en définir de manière plus pertinente l’originalité.

Après cette longue période d’enrichissement personnel et de réflexion, Venet reprend le chemin de son atelier en 1977. Durant plusieurs mois, en cachette, il tâtonne, se cherche, pour renaitre enfin dans un tout nouveau style. J'ai fait un premier tableau, raconte Bernar Venet[1]. Un triangle tout blanc, à la base duquel j'avais tracé l'angle, en indiquant le nombre de degrés. D'autres avec des arcs. Je ne savais pas où j'allais. C'est comme ça que j'ai recommencé. D'abord sur toile, avant de me rendre compte que je pouvais m'en passer et ne garder que le sujet principal, c'est-à-dire l'angle, ou l'arc.

Venet fondation © Archives Bernar Venet, New York

Bernar Venet, 115.5˚ Arc, 1988. Acier peint. 19 x 38 x .98 m. Installation permanente : Jardin Albert 1er, Nice, France

Arcs, Angles et Diagonales (1979), une sculpture en bois, marque un renouveau dans sa carrière. Car Venet n’est jamais là où on l’attend. Il délaisse les angles et arcs sur toiles pour des œuvres volumineuses et opte rapidement pour l’acier Corten avec ses Lignes indéterminées (1979). Spirales gigantesques, torsions de poutrelles, enlacements monumentaux de cerceaux et de cercles, juxtapositions imposantes de lignes brisées, de courbes interrompues, sphères éclatées, effondrements, arcs en désordres… Ses œuvres aux dimensions parfois colossales, lourdes de plusieurs dizaines de tonnes, font la réputation internationale de Venet et s’installent un peu partout dans les espaces publics des grandes villes du monde entier : Paris, Tokyo, New York, Pekin, Berlin, San Francisco… A Nice, en 1988, est exposée dans le jardin Albert 1er, Arc de 115°5 une sculpture monumentale de 19 mètres de long et depuis 2010, 9 lignes obliques hautes de 30 mètres, se dressent pace Sulzer, face à la mer. A Versailles en 2011, sur la place d’Armes, devant les grilles du Château, 8° Arc x 16, lance sa double rangée d’arc d’acier Corten de 22m de haut autour de la statue de Louis XIV. Les 114 tonnes de l’œuvre nécessitent de retirer tous les pavés autour de la statue et de creuser le sol sur un mètre de profondeur afin d’installer un châssis de 15 tonnes de métal permettant de supporter la sculpture. Le châssis lui-même doit être solidement maintenu par des micropieux enfoncés jusqu’à 15 m dans le sol !

Autre projet ambitieux : en 1984, le ministre de la culture, commande à Venet Arc Majeur, la plus grande sculpture au monde, pouvant contenir à elle seule l’Arc de Triomphe ou la Statue de la Liberté. Il s’agit d’un arc de cercle brisé de 185.4 ° à l’intérieur duquel passerait l’autoroute A6 à hauteur de Laduz dans l’Yonne. D’une hauteur de 53 mètres d’un côté et de 15 m de l’autre, un escalier intérieur permettrait à une personne de grimper jusqu’en haut. Mais le projet est abandonné.

Encore plus insensé, encore plus fou : le projet Grandes Diagonales qui doit célébrer le centenaire des droits de l’Homme. L’idée ? Faire de la planète terre une œuvre d’art. Venet imagine une gigantesque barre d’acier en plein Paris, placée de telle sorte qu’elle ressortirait dans une ville d’Australie dans la continuation de cette ligne virtuelle souterraine, dont seules les deux extrémités seraient apparentes. Chaque morceau correspondant à un segment d’une ligne absolument parfaite, calculée de manière mathématique. Des écrans géants seraient aménagés de part et d’autre pour permettre à des gens de cultures différentes de communiquer entre eux. Mais le projet ne voit pas le jour. 

Mais rien n’arrête Venet. En 1987, l’artiste réalise, pour le 750ème anniversaire de la ville de Berlin, Arc 124.5°, une œuvre monumentale mesurant 36 mètres de haut qu’il installe au milieu de la célèbre Alexanderplatz. « Ma sculpture a toujours entretenu un rapport étroit avec les mathématiques. Qu’il s’agisse de la géométrie des Arcs, des Angles ou des Lignes Obliques sur lesquelles, je fais graver leur identité mathématique. Prenons par exemple 224.5° Arc x 8 qui est inscrit sur une sculpture composée de 8 arcs de 224,5° chacun. Mes œuvres plus complexes telles que les Combinaisons aléatoires de lignes indéterminées ou les Accidents sont identifiables par contre à des mathématiques plus récentes, telles que la théorie du chaos, des catastrophes ou la science de la complexité.
Ce qui m’intéresse, ce qui motive réellement mon activité, c’est cette liberté de mouvement, cette possibilité de remettre ce qu’il est devenu conventionnel de penser. C’est aussi cette part d’incertitude qui plane sur la réalité artistique de ce nouveau travail. Il échappe aux modèles en cours, à ce qui se voit aujourd’hui dans le milieu de l’art »[2].

 Venet Foundation © Jérôme Cavalière, Marseille

Bernar Venet, Effondrement: 200 tonnes, 2015, Acier Cor-ten Sculpture sans dimensions spécifiques

Dans les années 90, Venet abandonne les arcs et les angles pour les Lignes indéterminées et les Accidents. C’est à la suite d’une chute malencontreuse d’un ensemble de poutrelles d’acier posées verticalement contre un mur, que Venet découvre le monde infini de l’imprévisible. Désormais, le chaos, les combinaisons, les mathématiques du hasard remplacent la géométrie et la trigonométrie. L’aléatoire chasse Pythagore et Euclide. « L’Inattendu » est le nouveau maître mot de l’artiste. Il étend peu à peu les lignes indéterminées à des « surfaces indéterminées » - des reliefs en acier oxycoupés.

[1] Entretien avec Harry Bellet

[2] Entretien avec Philippe Piguet - 2012

Les années 2000
Venet Fondation © Archives Bernar Venet, New York

Bernar Venet, 9 Lignes obliques, 2010, Acier Corten Hauteur : 30 mètres. Installation permanente. Promenade des Anglais, Nice, France

En 1999, Venet publie, ses textes poétiques, Apoétiques 1967-1998. Il a alors l’idée d’un retour en arrière. Il réalise des équations mathématiques sur de gigantesques fonds de couleur uniforme. Rien que durant l’année 2000, il compose ainsi plus d’une trentaine d’œuvres murales  - Equations Majeures - qu’il expose un peu partout. Puis il enchaîne avec ses Saturations qui tranchent de manière catégorique avec ses œuvres du passé. « Durant ma période conceptuelle, toute relation à des problèmes formels et esthétiques était exclue. Mes œuvres étaient austères, aussi neutres que possible pour n’en valoriser que le contenu. Rien n’était fait pour améliorer leur présentation, il fallait éviter le danger de la séduction. Avec l’âge, j’ai appris que la jouissance n’est pas interdite, que le plaisir n’est pas hors la loi. Alors la couleur s’est introduite dans ces nouveaux travaux. [1]». En 2011, Venet utilise, à Brasilia, un mur de 57 mètres de long pour peindre des formules mathématiques sur un fond vert émeraude, séparées par des intervalles de jaune. Une couche de peinture acrylique est d’abord appliquée sur tout un pan de mur par un peintre en bâtiment. L’artiste peint ensuite le dessin du diagramme de manière très précise. Durant toute cette période, Venet ne cesse de répondre à des commandes. En 2006, il réalise une somptueuse acrylique de 30 mètres par 4.75 mètres sur le plafond de la galerie Philippe Séguin de la Cour des Comptes, 2 Arcs de 111° et 86° pour le métro de Toulouse, quatre gigantesques sculptures nécessitant 1200m2 à l’Arsenale Novissimp de Venise… Sans oublier 9 lignes obliques, pour célébrer le 150ème anniversaire du rattachement de Nice à la France. Plus récemment, en 2012, l’artiste renoue avec ses sculptures colossales. Huit arcs de 88.5° (88.5°Arc x 8) élèvent leur 27 mètres de corten vers le ciel de Gibbs Farm près d’Auckland en Nouvelle-Zélande.

[1] Idem

Le Muy, Fondation Bernar Venet
Venet fondation © Jérôme Cavalière, Marseille

Bernar Venet, Trois lignes indéterminées,1996 Acier roulé 270 x 280 x 360 cm

C’est en 2009 que l’artiste crée sa propre fondation afin de venir en aide à de jeunes artistes, et d’octroyer des bourses aux futurs talents. C’est au Muy, dans une usine désaffectée du Var, que Venet décide de « poser » enfin on œuvre, comme on pose ses valises. « Il y a mes travaux, ma collection, un espace pour des expositions temporaires… une bibliothèque, une documentation, des archives très rares des années 1960. Les chercheurs et les artistes pourront venir travailler ici »[1].
Dans ce moulin du XVème siècle bordé par une rivière, Venet montre les œuvres d’artistes incontournables qu’il a pu acquérir au fil du temps. Flavin, Des Stella, Judd, Motherwell y côtoient Arman, César ou Morellet. Bref, toute une génération d’artistes qui ont fait le XXème siècle est ici représentée afin que la génération qui fera le XXIème siècle s’en serve, s’en imprègne et s’en souvienne.

[1] Entretien avec Harry Bellet, Le Monde 11 janvier 2011

Sources

http://artsim.fr/parcoursnice21/?page_id=26

http://images.math.cnrs.fr/Bernar-Venet-de-l-art-et-des.html

http://www.venetfoundation.org/

Bernar Venet, œuvre sculpté, Editions Somogy.

Bernar Venet, histoire de l’arc

Bernar Venet, de Thierry Lenain, Editions Flammarion

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